samedi 19 avril 2014

DOSSIER PROCEDURE : L’EFFET DE LA CONSTITUTION TARDIVE D’AVOCAT EN APPEL



L’avocat appelant ayant déposé ses conclusions d’appel au greffe de la cour,   et les ayant fait signifier ensuite par huissier de justice à partie dans les mêmes délais, alors qu’à l’époque de l’acte de l’huissier, il n’existe aucune constitution de confrère pour l’intimé,  doit-il les notifier à nouveau à cet avocat lorsque celui-ci constitue postérieurement  à la signification ?

La réponse claire et nette est NON, dit la Cour de cassation dans un arrêt du 10 avril 2014 (N° 13-11134).

Une question encore. Raisonne-t-on en jour ou en heures ?

Imaginons en effet que la signification de l’huissier soit faite le même jour que la constitution de l’avocat de la partie à laquelle on a signifié.

Bon, là, je ne sais pas.

J’ai bien une idée : considérer,  comme en matière de procédure collective,  pour les ouvertures,  que l’acte de l’huissier de justice [qui normalement devrait comporter l’heure de délivrance, mais ne la comporte jamais dans la réalité] est censé délivré à 0 heure.

Ce qui mettrait hors jeu la constitution de l’avocat de l’intimé.

Quoi qu’il en soit, il faut approuver la décision de la Cour de cassation qui va bien dans le sens des souhaits de la réforme MAGENDIE : on ne peut pas tout de même exiger de l’avocat de la partie appelante qu’il passe son temps à signifier puis à notifier à la partie ou à l’avocat adverse. Il faut que l’intime joue le jeu aussi. Ce qui veut dire qu’il faut que le client remette à son avocat l’acte qui lui a été signifié … Chacun prenant ses responsabilités.

vendredi 18 avril 2014

DOSSIER AVOCATS : DEBOUT OU ASSIS ?


DOSSIER AVOCATS : DEBOUT OU ASSIS ?

Il a bien longtemps, un avocat parisien, pareil à la réputation qu’il a généralement en province et en Provence en particulier, était à plaider à Aix en Provence.

Au bâtonnier FILIPPI,  qui était là, il demande,  parait-il  pointu,  (en fait je n’en sais rien) :« comment plaide-t-on ici ?

L’autre du tac au tac : « debout et en français ».

Pour le français, l’observation de FILIPPI parait toujours valable.  J’en sais quelque chose, lorsque j’ai essayé,  voici quelques mois de citer un dicton en anglais dans une plaidoirie au Conseil constitutionnel, dicton dont j’allais donner ensuite la traduction en français. 

Non m’a dit avec le sourire,  lorsqu’il m’a interrompu, le président DEBRE, « en français tout de suite ».

Mais debout ? Un avocat (valide j’entends) doit-il obligatoirement plaider debout ? En voilà une bonne question.

Il ne manque pas de juridictions où on plaide assis. Il parait qu’on le fait au Conseil d’Etat devant quelques formations.

J’ai personnellement plaidé quelquefois assis devant telle formation des référés du Tribunal de grande instance de Paris. Aux Tribunal de commerce de Paris, ou du pourtour parisien, tout le monde est assis devant le juge rapporteur. A celui de Marseille, pour les affaires audiencées au salon d’honneur (jadis les référés, aujourd’hui les procédures collectives),  mais aussi devant les juges commissaires ou rapporteurs, c’est pareil, on plaide assis. Personne n’a jamais  trouvé à y redire, au contraire.

J’essaie  finalement de trouver un point commun à ces façons de faire.

Il est,  je crois,  le suivant : dès lors qu’il n’existe pas de barre isolée,  avec un lutrin permettant à l’avocat de poser son dossier, donc dès lors notamment qu’on est autour d’une table, ou d’un bureau,  c’est tellement plus sympathique de le faire assis.

Bon, pour autant qu’il y ait de quoi s’asseoir. Ma fille m’a rapporté qu’allant plaider devant la commission de discipline d’une prison, il lui avait fallu attendre… l’arrivée d’une chaise.

 

jeudi 17 avril 2014

DOSSIER PROCEDURES COLLECTIVES: MORT DE TREILHARD ET FIN DE REUNION



Je retrouve ce billet de janvier 2012.

J’écrivais il y a deux ans à peine que le  Conseil constitutionnel n'a jamais l'occasion de statuer sur les questions prioritaires de constitutionnalité en matière de procédure collective.

Les choses ont bien changé rapidement.  Car il ne se prive plus de dire le droit constitutionnel sur le sujet.

Revenons à mon ancienne communication. 

J’y traitais d’une décision du 20 janvier 2012

 


 

En disant non conforme à la constitution l'art. L.624-6 du Code de commerce.

 

Je cite ce texte : « le mandataire judiciaire ou l'administrateur judiciaire peut, en prouvant par tous les moyens que les biens acquis par le conjoint du débiteur l'ont été avec des valeurs fournies par celui-ci, demander que les acquisitions ainsi faites soient réunies à l'actif ».

 

Le nom des parties et ce que j'ai compris indiquent à tous les coups qu'on était ici en présence d'un couple marié sous un régime islamique, la loi du mariage étant alors la séparation de biens (à deux exceptions près, la Turquie et la Tunisie, avec réserves et pour combien de temps encore ?).

 

Après cela, c'est très simple. Le mari est commerçant. A l'époque où il en gagne, il donne de l'argent à son épouse. Celle-ci joue la fourmi et constitue un patrimoine. Puis, faillite du mari, et le liquidateur va chercher l'épouse pour réunir son patrimoine séparé ainsi constitué à celui du mari failli.

 

On n'a rien découvert ici. C'est en effet une très vieille histoire.

 

Déjà notre confrère de l'époque, Jean-Baptiste TREILHARD (1742-1810), ancien membre de la Convention, puis du Directoire, enfin président de la section de législation au Conseil d'Etat, en charge de la codification des quatre Codes, civil, de procédure civile, de commerce, et criminel, à l'origine de la reprise de texte, expliquait:

 

« « Avec quel scandale des femmes mariées sans fortune et sans dot réelle, sont-elles, à l'ombre d'acquisitions prétendues, actuellement en possession de toute la fortune d'un mari reliquataire de plusieurs millions envers ses créanciers. Il serait révoltant que la femme du banqueroutier vint enlever ses gages et sortir triomphante d'une catastrophe dont elle fut souvent la première cause.

De sorte que les malheureux créanciers étaient condamnés à passer leurs jours dans les privations et dans les larmes pendant que la femme coulait des jours tranquilles dans la mollesse et l'oisiveté. Tous les arts concouraient pour décorer le palais qu'elle habitait.

Une cour nombreuse prévenait ses désirs et flattait ses goûts et lorsqu'elle daignait faire tomber quelques faibles secours sur un petit nombre de malheureux, non par bienfaisance, car la bienfaisance n'habite pas avec le vol, dans l'espoir que les bénédictions de quelques infortunés étoufferaient les malédictions de la multitude, ces actions prétendues d'humanité étaient encore proclamées avec éclat par des écrivains officieux jusque dans les cours étrangères. » »

(Extraits du registre des délibérations du Conseil d' Etat, corps législatif, séance du 1er septembre 1807, pp. 32 et suivants).

 

 

Comment interpréter la décision du Conseil constitutionnel ?

 

1°. Elle signifie tout d'abord que le mouvement général d'adoucissement de la loi en matière de faillites, se poursuit. La faillite est désormais quelque chose de banal.

 

2°. Elle est une nouvelle victoire des débiteurs sur les créanciers.

 

3°. Elle signifie aussi qu'il faut cesser de considérer que tout est simple dans la société actuelle, ceux qui se reconnaissent bons et honnêtes d'un côté, et ceux qu'on dit malhonnêtes et incompétents de l'autre.

Car la réalité est que les bons sont bêtes et que les autres sont intelligents. Il n'est pas interdit, il est au contraire obligatoire d'être malin.

 

4°. Elle veut dire que tant qu'on n'est pas en état de cessation des paiements (18 mois avant le jugement déclaratif, 24 mois en Italie, je le rappelle), on est in bonis, et que par conséquent on peut tout faire. Donations comprises.

 

5°. La chose a été plaidée du bout des lèvres devant le Conseil constitutionnel. Le pire est que le liquidateur judiciaire en défense sur la Q.P.C. ne pouvait même pas l'évoquer lui : en immobilier, désormais on peut mettre à l'abri non seulement son domicile mais aussi un autre bien, voire tout l'appareil de production.

Et dans un arrêt de l'an dernier qui a été commenté ici, on sait que la Cour de cassation juge que la déclaration d'insaisissabilité ainsi faite prend effet à sa publication au fichier immobilier, étant alors totalement opposable à tous les créanciers. La notion de période suspecte n'existe pas ici.

 

6°. Et l'insaisissabilité, c'est pour tout le monde. Y compris le liquidateur judiciaire s'il le veut sur son domicile ou un autre bien.

 

7°. En parallèle, le périmètre des droits propres des débiteurs et surtout des représentants légaux de sociétés faillie augmentent sans arrêt.

 

8°. Face à cela, les politiques de sanctions personnelles contre les dirigeants sonnent comme des moyens dérisoires, tout au plus contre ceux qui n'ont pas su protéger leurs patrimoines en faisant appel aux avocats qui savent. Et surtout, en ne changeant pas parce qu'il faut faire plaisir au dernier crétin venu, les mesures organisées pour cela. Ceci veut dire qu'on ne doit envisager de faire du commerce ou toute autre activité susceptible de vous conduire à la faillite qu'à la condition d'être séparé de biens si on est marié, avec un patrimoine à sécuriser sans arrêt. Et des femmes et des hommes de confiance autour de soi.

 

9°. Et qu'il ne faut pas attendre aujourd'hui moins qu'avant quoi que ce soit du règlement collectif des impayés : les mandataires judiciaires ne sont pas des surhommes et les moyens légaux qui leur sont donnés ne sont pas à la hauteur de ce que croient généralement les employées naïves des entreprises créancières. Le sourire n'a jamais rien réglé, aujourd'hui moins qu'avant.

 

10°. L’art. L. 624-6.  Est passé à la trappe. Tous moyens ou pas tous moyens.

mercredi 16 avril 2014

DOSSIER AVOCATS : CHRONIQUE DES BONS AVOCATS



Oh non, je ne suis pas l'auteur de ce qui suit. C'est notre ami Pierre DOYEN qui l'a écrit pour moi.

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On se perd en conjectures.

Pour embrasser cette profession, il faut justifier d'un certain niveau, voire d'un niveau certain de formation intellectuelle et technique.

Mais,  par la faveur de la loi et du décret, la profession est  également  habitée par des émigrés latéraux. Ils pénètrent dans le cénacle par la porte latérale, dispensés de justifier du niveau de connaissances légalement requis.

Aussi avons-nous eu l'insigne honneur de voir arriver  dans nos rangs des confrères, ayant pour tout bagage universitaire: le certificat d'études primaires élémentaires!

C'est pourrait-on dire la bigarrure intellectuelle de la profession.

Celle-ci est libre.

Du moins la naïveté de ses membres le croit-elle.

O cruelle méprise! Libre par déclaration de la loi, l'avocat est caporalisé au mépris de tous les principes de droit excipés, pour la défense de ses propres clients.

Le statut d'avocat est une « capitis diminutio », comme eussent dit des jurisconsultes à Rome.

 

Il n'est pas certain que nos lointains ancêtres du temps de Cicéron eussent accepté notre statut infra-canin! Il a fallu plus six siècles pour que vît le jour le « corpus togatorum », préfiguration de l'Ordre des avocats.

L'accoucheur de cette funeste institution est au VIème siècle l'empereur JUSTIN 1er, qui voulait connaître le nombre des avocats exerçant auprès de chaque tribunal de l'empire.

Plus habile que ne sera son imitateur du XIXème siècle (NAPOLEON 1er, c’est moi qui ajoute) il s'était bien gardé d'exposer la raison réelle de la venue à l'existence du « Corporis togatorum ».

A l'avocat médiocre,  pour vivre il lui suffit d'avoir le sens de la mangeoire, faire des salamalecs aux « kakistocrates » de son ordre.

Et il vit en père peinard.

Pour celui qui est plus doué que la moyenne, son existence est en elle-même  un problème pour la « kakistocratie », car elle lui réfléchit,  tel un miroir,  l'image de sa propre médiocrité.

Or les médiocres ne peuvent pas d'eux-mêmes devenir brillants, alors ils cherchent à briser le miroir.

Etre doué dans ce microcosme est très onéreux psychologiquement et matériellement, aussi vous harcèle-t-on de poursuites disciplinaires.

Vous passez alors un temps considérable à faire fonctionner vos neurones pour défendre vos libertés et dignité.

Ce temps précieux et votre compétence sont distraits de votre activité professionnelle.

In fine tout se passe comme si vous étiez un médiocre parmi d'autres, quant à l'efficience partielle de votre activité professionnelle.

Extérieurement il y a équivalence des résultats.

Voilà pourquoi la profession est riche en médiocrité et fort pauvre en qualité.

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Pierre DOYEN ajoute que « kakistocrate » est le  néologisme qu’il a créé, formé à partir de « kakos » signifiant mauvais et « cratos » pouvoir. Le « kakistocrate » est l'antonyme de l’aristocrate.

L'aristocratie est ainsi  le gouvernement des meilleurs, en contrepoint la « kakistocratie » est le gouvernement des pires.

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Alors me voilà à commenter maintenant et ici mon commentateur génial.

Pas commenter, en fait lui  ajouter une petite chose.

Il arrive que les élus soient si contents d’eux-mêmes qu’ils éditent alors,  aux frais de leurs médiocres électeurs,  de belles brochures sur papier glacé, dans lesquelles ils ne manquent pas de se congratuler largement et librement.


« Passez-moi la rhubarbe, je vous passerai le séné." Se susurreraient ils s’ils avaient de la culture classique.


DOSSIER AVOCAT : L’AVOCAT DOIT IL ETRE LISSE ?


L’avocat doit il être obligatoirement lisse ?

C’est  quoi au juste  « être lisse » ?

C’est être discret, modeste, obéissant. Ne jamais « faire de vagues »,  comme on dit en français vernaculaire qui veut bien dire ce qu’il dit.

Pas d’histoire, jamais  de plainte, à tort ou à raison.

Ne jamais se battre, ne jamais protester.

Le silence. Je dirais même la médiocrité. C’est alors même à se demander comment ses clients peuvent l’avoir choisi pour les défendre.

L’avocat idéal pour les requins.

Ce billet me remémore une sériée télévisée policière américaine passée.

On est dans un commissariat de Manhattan. On vient de tuer un avocat. C’est grave là bas.

Rapports de ses inspecteurs au commissaire, un superbe black. Chef, on a enquêté. On n’a rien trouvé  du tout sur ce type.

Le commissaire, interloqué et superbe : c’est impossible, un avocat sans histoires, ce  n’est pas un avocat.

DOSSIER LA CRISE C’EST DONC LA FAUTE AU GIN TONIC


 

Il y a quelques mois, j'avais écrit qu'en Espagne, Enfin, tout au moins, on avait trouvé la solution pour sortir de la crise. On nous dit d'ailleurs que la situation espagnole a tendance à ne plus s'aggraver, mais plutôt à commencer d'aller vers le mieux.

Il parait qu’un groupe de députés activistes  et de gauche s'attaquaient alors  à l’aide financière indirecte subventionnant le bas prix du gin tonic à la buvette du Palais des Cortes (la chambre des députés espagnols). Du coup, les élus devaient  le payer plus cher.

On redécouvrait  à cette occasion que cette boisson est très en vogue dans le pays, ce qui est vrai, j’en atteste d’autant plus que j’en suis buveur, et que les Espagnols savent le présenter avec raffinement, au point de vous demander à chaque fois quelle marque de gin vous souhaitez boire, même dans le plus petit bistrot.

Bref, on avait  trouvé la solution à la crise,   du moins en Espagne, c’est  donc la faute au prix du gin tonic à la buvette de l’assemblée.

Ceci rappelle Pétain (qui avait été ambassadeur de France à Madrid quelques années auparavant), lorsqu’ en 1940, il avait décidé que la cause de la débâcle française était la consommation du pastis (en Algérie, l’anisette).
 
Au moment où un nouveau gouvernement socialiste est au pouvoir en France, je lui suggère l'expérience espagnole précitée et ainsi une sortie de crise à notre santé.
 
 

mardi 15 avril 2014

MISCELLANEES : PAROLES VERBALES ET SENS DE L’HUMOUR


 

 

A défaut du reste, il semblerait que la tradition se soit créée dans l’Algérie indépendante, de l’humour,  dans l’expression diplomatique tout au moins.

L’actuel  et aussi  futur président,  Abdelaziz BOUTEFLIKA, alors ministre des affaires étrangères de mon pays natal, donc assez  le mien, a été tout de même été dans le temps le créateur de cette formule  extraordinaire, désormais  si courante et sans aucune  valeur, non seulement dans la diplomatie, mais finalement partout, y compris dans notre profession :

« «  Les paroles verbales « « .

A la suite de l’observation présidentielle française de la sortie d’il y a quelques mois,  quant aux dangers affrontés et surmontés ALGER par Monsieur Manuel VALLS, notre ministre de l’intérieur du moment, voici que ces messieurs de KOUBA ont  communiqué  ensuite cette admirable chose :

« «Le sens de l’humour peut apporter une valeur ajoutée au sens des responsabilités lorsqu’il s’exprime avec élégance, avec mesure et qu’il introduit de la décontraction dans le cadre de cet art souvent austère qui est la pratique de la diplomatie. A l’inverse, le sens de l’humour peut être générateur d’une moins-value lorsqu’il abouti à suggérer que les réalités ne seraient pas celles qui sont à la portée de tous et qui ont pu être vérifiées par tous »».

 

Voici que Monsieur VALLS est maintenant premier ministre.

 

KOUBA, c’est la grande banlieue d’ALGER. Le ministère  algérien des affaires étrangères y siège  là, bien loin de la ville.

On doit maintenant  s’y gratter la tète.