dimanche 13 avril 2014

ARMENORUM : GEORGES CLEMENCEAU ET LES MASSACRES D’ARMENIE


 

Le gisement culturel et historique exceptionnel constitué,  à la BIBLIOTHEQUE NATIONALE DE France,  par  le fonds GALLICA, en ligne,  permet de faire des découvertes exceptionnelles, pour comment dire,  briser les silences, les mensonges, les hypocrisies.

Sauf que celles-ci ont toujours,  dans notre pays,  la vie dure,  même très dure voire  agressive. Car certains vont même jusqu’à prétendre interdire de vous sentir victimes d’actes de racisme, d’ostracisme, de réserves, de choses pas très belles, puisque fondées uniquement sur les trois dernières lettres de votre nom de famille.

A bientôt 67 ans, je connais admirablement la question, moi qui en plus, ne suis qu’un morceau d’Arménien. Fier de l’être.

Un exemple d’avocat : impossible d’avoir un nom comme le mien et d’être voire surtout de rester l’avocat d’un institutionnel. Vous êtes barré. D’autres minorités  dans l’originalité du nom de famille n’ont heureusement pas ce travers. Au contraire même.

C’est spécialement valable dans une ville aussi raciste que  MARSEILLE, qui compte tout au plus un seul élu municipal important arménien. Quand on lit les  actuels bulletins de vote, on est atterré. Même dans les deux ou trois quartiers réputés arméniens de la ville, on compte les IAN sur les doigts d’une main, jamais en  position d’éligibilité. Et c’est valable de l’extrême gauche à l’extrême droite (sauf  une exception socialiste, une).

Pour le barreau, sous l’odieuse menace,  je n’écris rien ici. Mais je n’en pense pas moins.

Revenons à la littérature historique. C’est donc à ce moment que je découvre la réimpression par HACHETTE et la B.N.F. d’un ouvrage de témoignages  de victimes de massacres d’Arméniens, mais en 1895. Publié au MERCURE DE FRANCE en  1896. Car la question arménienne n’a pas attendu 1915 et le déchainement de TALAT PACHA. Elle a toujours existé spécialement à l’aube du XXème siècle.

Mes cousins américains sont d’ailleurs les descendants d’un Vincent KUCHUKIAN parti à NEW YORK dès  1907, quelques années après ces massacres là. Et bien avant la suite sinistre.

L’ouvrage réimprimé  est terrible en descriptions, détails et inventaires.

Mais c’est sa  présentation  qui est la plus remarquable. 

Car il est préfacé rien moins que par Georges CLEMENCEAU lui-même.

Le futur  tigre et vainqueur de la grande guerre s’y révèle un défenseur exceptionnel de la cause arménienne, et un dénonciateur à la fois des massacres et de l’hypocrisie  bien élevée générale.

Je le cite :

« « La vérité et connue et la tartuferie de nos diplomates d’Europe ne peut plus abuser que des complices de l’universelle lâcheté » ».

« « Mensonges, les traités : lettre morte, les promesses du Sultan,, les stipulations protectrices contresignées pour la forme par les délégués de toutes les puissances » »

«  « Si ce qu’on est convenu d’appeleur l’Europe a laissé massacrer les chrétiens à plaisir, l’église ne pouvait faire autrement que de s’émouvoir » »

« « La puissance  qui lança jadis si bruyamment  toute l’Europe chrétienne à l’assaut de l’islamisme est trop engagée dans les détours d’une diplomatie compliquée pour écouter l’intérêt d’une fois chrétienne d’ailleurs dissident » »

On croit revoir la scène  du catéchisme à l’institution Mélizan de MARSEILLE dans le « Mayrig » d’Henri VERNEUIL. Tiens, en voilà un superbe exemple : pour réussir au cinéma comme réalisateur,  Achod MALAKIAN avait du changer son nom de famille.  Il n’y a pas si longtemps encore un futur professeur ensuite doyen de la Faculté de droit d’AIX EN PROVENCE, plus tard lâchement assassiné en Egypte,  avait du changer son nom de famille arménien en une autre consonance pour aider à avoir son agrégation. Il me l’avait confié en privé. Je pourrais en dire plus. Ce ne serait  surement pas agréable pour certains.

Pour en revenir à CLEMENCEAU, il résume si bien : «« On invite les Arméniens à déposer leurs armes, on les menace de mort s’ils n’obéissent pas » ».

Les armes de la France d’aujourd’hui ne continuent  toujours de poudre. Mais elles restent des armes, avec des menaces.

 

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